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Shaytân, les Démons et les Djinns

 

Shaytân, les Démons et les Djinns

 

 

Voilà bien trois sombres entités qui peuplent, au mieux, l’imaginaire des musulmans, au pire, leur esprit : Shaytân, les Démons, et les Djinns. Or, de ces trois aucun n’est visible, ils brillent ainsi par leur absence et, de ce fait, ils ne devraient leur existence qu’à notre pensée, nous-mêmes. L’on peut donc dire que ShaytânDémons et Djinns n’existent que parce l’Homme existe. De l’existence de l’Homme nous sommes sûrs, c’est une donnée observable, quantifiable. Par contre, de l’existence de ces mauvais doubles imperceptibles nous ne pouvons apporter de preuves concrètes, directes, cela relève du spéculatif.

– Ceci étant, de manière culturelle autant que cultuelle il semble que depuis la nuit des temps, l’Homme se soit intéressé à ce qu’il ne pouvait voir. L’imagination remplace alors la raison et le champ des possibles s’élargit considérablement et aisément. Telle est la pente naturelle de l’herméneutique humaine : la facilité et la satisfaction que l’on en éprouve, croire plutôt que penser. Étrange zone hybride entre le domaine animal et celui de la pensée humaine où la raison cède le pas à l’hormonal.

– Cependant, en tant que musulman et croyant il nous est offert un outil incomparable pour sortir de cette ornière millénaire : le Coran/al–qur’ān. En effet, et ce n’est pas un paradoxe, la Révélation est le seul moyen cohérent qui permette de connaître avec certitude de quoi est composée cette réalité irréelle, ce ou ces mondes appartenant à la Réalité Imperceptible/al– ghayb. Le musulman dispose donc du Coran pour tenter de comprendre dans quel monde il vit et les forces en présence. En l’occurrence donc, ce que l’on pense être des forces invisibles et influentes nécessairement supérieures, mais faudrait-il perdre la raison à ne vouloir pas raisonner…

Un passage coranique nous fournit le support pour clarifier qui de Shaytân, les Démons, et les Djinns existe ou pas. Il s’agit des vs210 à 220 de Sourate Les Poètes. Nous nous appuierons sur notre Traduction et Exégèse Littérales du Coran :

– Ce ne sont point les démons qui avec ceci se laissent descendre. Cela n’est point concevable pour eux et, de plus, ils n’en auraient aucune possibilité. En vérité, de toute écoute ils sont tenus à l’écart. Par conséquent, tu n’invoqueras pas avec Dieu une autre divinité, car tu serais alors au nombre des tourmentés, avertis ton lignage le plus proche et abaisse ton aile sur ceux qui t’ont suivi parmi les croyants. S’ils te font face, alors dis : Je ne suis pas responsable de ce que vous œuvrez, et place toute ta confiance dans le Tout-Puissant, le Tout Miséricordieux, Lui qui te voit au moment où tu te dresses ainsi que ton émoi quant aux humbles devant Dieu ; Il est, certes, le Pleinement Entendant, le Parfaitement Savant.

Du point de l’analyse littérale conduite, ce paragraphe resserre la mise au point sur le Coran en tant qu’argument de la véracité du Prophète que Quraysh récuse et réfute avec entêtement.

 

  • Vs 210-212 : « Ce ne sont point les démons qui avec ceci se laissent descendre. [210] Cela n’est point concevable pour eux et, de plus, ils n’en auraient aucune possibilité. [211] En vérité, de toute écoute ils sont tenus à l’écart. [212] »

وَمَا تَنَزَّلَتْ بِهِ الشَّيَاطِينُ (210) وَمَا يَنْبَغِي لَهُمْ وَمَا يَسْتَطِيعُونَ (211) إِنَّهُمْ عَنِ السَّمْعِ لَمَعْزُولُونَ (212)

Par « ceci », il faut donc entendre : le Coran.  Il est fait ici allusion à une des accusations récurrentes de Quraysh, ex. : « or, ils disent : Ô toi ! Celui sur qui on a fait descendre le “rappel”, tu n’es certes qu’un possédé », S15.V6, c.-à-d. selon les croyances de l’époque quelqu’un possédé par un démon. Les Arabes pensaient que les “inspirés” étaient sous l’influence de « démons/shayāṭīn » ce que bien évidemment dément la révélation : « ce ne sont point les démons qui avec ceci se laissent descendre ». De même, le Coran défendra le Prophète contre ceux qui l’accusaient de n’être qu’un devin/kāhin, eux aussi réputés être inspirés par les démons, mais auxquels pour autant l’on portait crédit. Par conséquent, il est clairement affirmé que ce que transmet Muhammad en tant que prophète « n’est pas le propos d’un poète ; combien peu croyez-vous ! Il n’est pas non plus le propos d’un devin ; combien peu réfléchissez-vous ! », S69.V41-42. Le Coran va plus loin dans sa négation de toute influence de type paranormal sur le Prophète, il dénie l’existence même de cette possibilité de manière générale : « cela n’est point concevable pour eux et, de plus, ils n’en auraient aucune possibilité/mā yastaṭī‘ūna », v211. Autrement dit, “ceux” que vous appelez « démons/shayāṭīn » n’ont aucune capacité à saisir des informations relevant du monde parallèle, ce ne sont que de fausses croyances, car « en vérité, de toute écoute ils sont tenus à l’écart », v212. De plus, nous allons voir qu’aux vs221-223 le Coran retourne l’argument pour prouver la non-influence de ces démons imaginaires.

– Il convient donc comme nous l’avons indiqué en introduction de clarifier et classifier les points suivants, car le fonds de superstitions antiques qui nourrit l’inconscient des musulmans les conduit à confondre trois entités différentes que pourtant le Coran distingue explicitement.

– Premièrement, Shaytân/ash–shayṭān, pour le Coran il n’a pas d’existence réelle, ce n’est que l’Archétype du mal commis par l’Homme. En réalité il représente notre “Démon personnel”, cf. S2.V36 ; S2.V268 ; S14.V22 ; S22.V4.

– Deuxièmement, les démons/ash–shayāṭīn, ils n’ont logiquement pas plus d’existence réelle, ils représentent l’ensemble de nos pulsions et pensées négatives auxquelles nous cédons, cf. S2.V14 ; S2.V102 ; S2.V168 ; S6.V112 ; S17.V27 ; S25.V29.

– Troisièmement, les Djinns/jinn, selon le Coran ils existent en tant que créatures pensantes et douées de conscience. De ce fait tout comme nous ils seront jugés au Jour dernier, S37.V158. Cependant ils ne peuvent communiquer avec notre monde et non aucune influence sur les êtres humains. Sur cette croyance populaire toujours alimentée par nos doctes à l’esprit archaïque, l’on se reportera à notre déconstruction des versets suivants : S6.V128 ; S15.V16-18 ; S26.V223 ; S37.V6-10 ; S41.V12 ; S67.V5 ; S72.V1; S72.V6-9. Concernant donc ces trois catégories, il ne fait aucun sens pour un croyant monothéiste de croire et penser que des entités invisibles hantant plus son imaginaire que des mondes parallèles puissent avoir le pouvoir de nous influencer. Nous sommes nos propres influenceurs, notre propre “Démon intérieur” et nos propres démons.  Ces croyances ne sont que le reliquat d’idolâtrie ancestrale que pourtant le Coran est venu rationnellement éradiquer… Aussi, au v213 le Coran conclut-il en ces termes :  « Par conséquent, tu n’invoqueras pas avec Dieu une autre divinité, car tu serais alors au nombre des tourmentés ».

فَلَا تَدْعُ مَعَ اللَّهِ إِلَهًا آَخَرَ فَتَكُونَ مِنَ الْمُعَذَّبِينَ (213)

 

Dr al Ajamî

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